Beaucoup de publications spécialisées ou d’articles récents dans la presse font état du calcul du taux d’usure comme étant un des éléments pouvant limiter la distribution de crédit immobilier par les banques. Qu’en est-il vraiment ?
Pour bien comprendre, il nous faut commencer par expliquer deux notions : le taux d’usure donc, et le TAEG, pour le Taux Annuel Effectif Global. Défini par le Ministère de l’Economie et des Finances, le taux d’usure a pour principal objectif de protéger l’emprunteur en imposant aux établissements de crédit un taux d’intérêt maximal qu’ils ne doivent en aucun cas dépasser. Ce taux d’usure est calculé chaque trimestre par la Banque de France et prend en compte la moyenne des taux d’intérêt pratiqués sur les trois derniers mois par les principales banques françaises, majorée de 33%.
Le TAEG, lui, prend comme base de calcul le taux du prêt immobilier proposé par la banque au moment de la demande de prêt du client, auquel s’ajoutent les coûts exprimés en pourcentage de l’ensemble des frais annexes liés à la mise en place du crédit, soit : les frais de dossier de la banque et les frais dus aux intermédiaires, les frais liés à la prise des garanties, le coût des assurances emprunteur, les frais d\’ouverture et de tenue du compte ouvert à la mise en place du crédit ainsi que le coût de l\’évaluation du bien immobilier si nécessaire. Ainsi, et pour ne pas devenir usuraire, le TAEG d’un prêt immobilier ne doit en aucun être supérieur au taux d’usure fixé au début du trimestre.
Reflétant les conditions d’emprunt favorables du premier trimestre 2020, le taux d’usure a ainsi été fixé en baisse le 1er avril dernier à 2,40% pour les prêts à taux fixe sur des durées allant de 10 à 20 ans, et à 2,51% pour les prêts de 25 ans et plus. C’est cette baisse qui peut actuellement se révéler être un frein.
En effet, avant la période de crise sanitaire déjà, un nombre conséquent de dossiers pouvait se trouver en dépassement du taux d’usure, souvent à cause d’un coût d’assurance emprunteur pouvant être élevé dans certains cas. Ceci entrainait déjà une difficulté pour certaines typologies de clientèle d’être financées. A cela s’est ajoutée la hausse récente des taux des crédits immobiliers sur la période d’avril à juin. Cette hausse des conditions de prêt, même légère, a donc fait augmenter mécaniquement le TAEG. Cette augmentation conjuguée à la baisse du taux d’usure fixée début avril a eu un effet ciseau. C’est cette situation qui explique qu’aujourd’hui le TAEG calculé puisse encore plus rapidement dépasser le taux d’usure et bloquer une demande de crédit, empêchant ainsi certaines opérations immobilières de se réaliser.
Nul doute que nous devrions entendre reparler dans les prochains mois de ce sujet « taux d’usure » avec peut-être des évolutions liées à son mode de calcul pour éviter qu’un outil louable de protection de l’emprunteur ne se transforme en un élément de blocage pour ce dernier.